Le 2 janvier, nous entrons au Laos. Nous posons nos sacoches aux 4000 îles. Dans ce pays, le trafic est peu dense et sur certaines îles, il n’y a aucune voitures : un véritable luxe que nous savourons. Comme vous avez dû le deviner, ce n’est pas la mer, mais bien le Mékong, qui a changé depuis le Vietnam. Désormais, il est très large, parsemé d’îlots et presque bleu avec très peu de déchets à sa surface. Nous rejoignons ces territoires soit en empruntant un pont, soit en prenant de petits bateaux qui tanguent pas mal mais où il est possible de charger nos vélos. « Chiller » (≈ se reposer, relaxer et prendre du bon temps) et « manger » sont nos deux mots d’ordre. Et nous allons exécuter ces deux actions à la perfection pendant 2 jours. Nous avons besoin de compenser le nord du Cambodge qui s’est avéré compliqué pour la nourriture et avec de grandes étapes de vélo très fatigantes (dont une de 90 km, notre record). On découvre avec délectation les bananes frites au chocolat et les smoothies saupoudrés de graines magiques aux milles vertus. On décide quand même d’aller voir les chutes d’eau, principales attractions des îles. Nous sommes absolument seuls et on reste plusieurs heures à observer ces eaux agitées en bouquinant sur de confortables coussins en forme de prisme posés à même le sol. On fait le plein d’énergie.
Alors que l’on est en train de commencer à réfléchir à la suite du parcours, un voyageur à vélo français s’approche de nous. Cette rencontre va modifier toute la suite du parcours. C’est un baroudeur, non seulement il a une grande expérience du voyage (il a voyagé pendant 5 ans sur un bateau avec sa famille) mais en plus, il vient de parcourir tout le Laos. Il nous donne de précieux conseils. Maintenant, on connaît les endroits à éviter et ceux qu’il faut absolument voir. En attendant, c’est avec regret que nous quittons les 4000 îles en pensant à tort que nous avons vu l’unique point d’intérêt de la région.
Sur la route, nous nous arrêtons pour prendre notre petit-déjeuner. Le soleil est à peine levé. Assis dans l’herbe, nous mangeons en observant le début typique d’une journée au Laos. Les enfants en uniforme se rendent à l’école à vélo pendant que des adultes attendent à genoux, au bord de la route, la venue des moines. Ceux-ci, vêtus de toges oranges, marchent à pied nus avec un récipient métallique en bandoulière en quête d’offrandes. Les villageois déposent de la nourriture dans les réceptacles, ce qui assure la subsistance des moines. En échanges, ceux-ci récitent des prières.
Un moine âgé arrive à notre hauteur. Nous fouillons dans notre réserve de nourriture et en extirpons deux tomates que nous lui donnons. Nous nous agenouillons et le moine récite quelques paroles. Puis nous nous remettons en route, heureux d’avoir pu vivre, l’espace d’un instant, un rite bouddhiste séculaire.
Nous voilà à Champassak, une ville dans laquelle on hésitait à s’arrêter et quel gâchis ça aurait été. Une bande de sable blanc qui s’étend le long d’un Mékong encore plus bleu et au loin des montagnes qui nous apportent une touche de fraîcheur.